Les rendez-vous de l’économie circulaire

Compte-rendu du petit déjeuner sur le Gaspillage alimentaire 9 mars 2018

Le deuxième «  Rendez-vous de l’économie circulaire » a été organisé par l’INEC le 9 mars 2018 avec pour thématique cette fois-ci le gaspillage alimentaire. Autour d’un petit déjeuner se sont exprimés Cédric PREVOST, sous-directeur de la politique de l’alimentation au Ministère de l’Agriculture et l’Alimentation, Béatrice JAVARY, Directrice RSE Auchan, Anne-Cécile BERGONZI, responsable des projets développement durable/RSE à Auchan Retail France, Jean MOREAU, co-président et fondateur de Phenix et Jean-Claude MIZZI, co-fondateur et trésorier d’Hop Hop Food. Cet échange était animé par le président de l’Institut national de l’économie circulaire François-Michel LAMBERT et par Emmanuelle MOESCH, chargée de mission à l’INEC.

De la gauche à la droite: Jean MOREAU (Phenix), Béatrice JAVARY (Auchan), Jean-Claude MIZZI (Hop Hop Food) et Cédric PREVOST (Ministère de l’Agriculture et l’Alimentation)

François-Michel Lambert a inauguré les échanges en rappelant que les paysans ont toujours réutilisé les aliments et que l’humanité fait face à une parenthèse d’économie linéaire de laquelle nous devons sortir. Il est nécessaire de développer de nouveaux modèles économiques et organisationnels pour répondre aux attentes de la société et aux défis environnementaux.

Aujourd’hui l’alimentation est un sujet de société majeure et le gaspillage alimentaire est une problématique centrale de nos systèmes agricoles et agroalimentaires.

Le gaspillage alimentaire constitue l’un des volets du programme pour l’alimentation piloté par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation (aux côtés de la justice sociale et de l’éducation alimentaire). La France est un pays leader dans le domaine parce que dotée d’une loi (loi Garot, février 2016). Selon Cédric Prévost, sous-directeur de la politique de l’alimentation, le gaspillage alimentaire est appréhendé essentiellement à travers quatre dimensions : l’éducation, l’ancrage territorial, les professionnels et la réglementation.

Le gaspillage alimentaire a un coût économique et environnemental. L’éducation nationale constitue un partenaire clé, notamment par la création des parcours éducatifs (comme celui de la santé ou de la citoyenneté). La lutte contre le gaspillage implique également d’engager l’ensemble des acteurs tels que les restaurateurs, les agriculteurs et la restauration collective, à laquelle il est nécessaire d’étendre l’obligation de don aux associations caritatives. L’implication de la restauration collective nécessite toutefois de mieux encadrer la qualité du don alimentaire (freins fiscaux et sanitaires). À la suite des Etats généraux de l’alimentation, un projet de loi est actuellement en examen et les recommandations les plus prioritaires ont été rassemblés au sein d’une feuille de route.

Béatrice JAVARY et Anne-Cécile BERGONZI, représentantes d’Auchan Retail France ont rappelé que la lutte contre le gaspillage alimentaire constitue l’un des axes de la politique RSE du groupe. Pour une telle entreprise, le gaspillage alimentaire est un non-sens économique, écologique et éthique et requiert un travail tout au long de la chaîne de valeur. La politique RSE du groupe comprend plusieurs actions permettant d’agir sur le gaspillage alimentaire: gestion des dons, commercialisation de lombricompostes, recensement des initiatives des acteurs locaux et sensibilisation (MOOC de AgroParisTech sur le gaspillage alimentaire).

Phenix fait du gaspillage alimentaire le cœur de son objet social. Cette entreprise d’intérêt général apporte une solution aux problématiques logistiques de valorisation des invendus alimentaires entre la grand distribution (Casino) et les associations telles que Hop Hop food. Elle s’appuie notamment sur une plateforme numérique et sur des moyens logistiques de terrain pour gérer les flux de denrées et sensibiliser les acteurs à la démarche. Selon Jean Moreau, co-président et fondateur de Phenix, son entreprise permet de démontrer à la grande distribution les bénéfices des dons alimentaires en termes économiques au-delà de l’impact social et environnemental. La collecte, la mise en décharge et le stockage des déchets ont un prix. Le service fourni par Phenix permet aux acteurs de la grande distribution de réaliser des économies sur la destruction du déchet. L’enjeu financier est même double étant donné que le don en nature ouvre droit à une défiscalisation.

Néanmoins, l’action de Phenix ne se limite pas qu’à la distribution mais aussi à la production par la récupération des produits déclassées (pas bien calibrés).

L’action de Phenix en quelques chiffres

  • 4,5 millions d’euros de CA en 2017
  • 30 millions de repas depuis 2014
  • Plus de 100 000 repas par jour
  • 850 magasins par jour

Jean-Claude Mizzi, co-fondateur et trésorier d’Hop Hop Food, a fait état de la précarité alimentaire qui augmente en France. La réglementation, les limites aux actions du mouvement associatif (composé quasi-exclusivement de bénévoles et de services civiques) ainsi que l’ensemble des enjeux logistiques représentent des freins importants dans la lutte contre le gaspillage. Quelle notion de prix entre un légume moche qui a la même qualité qu’un légume calibré ? Une solution pourrait être de réutiliser les invendus non calibrés, en levant les enjeux de traçabilité (pour la restauration rapide), sanitaires et de sécurité alimentaire (pour la restauration collective). Selon Jean-Claude Mizzi, il est donc nécessaire de faire évoluer la réglementation.

Hop Hop food a pour mission de combattre le gaspillage alimentaire chez les particuliers en valorisant des aliments non consommés auprès de personnes en situation de précarité alimentaire : étudiants, migrants, femmes seules, etc. Il s’agit pour le moment d’une plateforme gratuite de mise en relation mais l’action de hop hop food devrait s’étendre à la mise en place d’infrastructures visant à structurer la solidarité alimentaire.

Le gaspillage alimentaire en quelques chiffres : 

Selon la FAO 1/3 de la production mondial est gaspillée ;

En France chaque année sont gaspillés 10 millions de tonnes par an dès la production primaire jusqu’au frigo. Ce chiffre représente 150 kg par an et par habitant (20kg restauration, 29kg à domicile, 20kg distribution) [1];

Par ailleurs le gaspillage alimentaire en France représente 5% des émissions de la France. Au niveau mondial si on cumule toutes les émissions des GES liés à la gaspillage alimentaire est le troisième émetteur après les EUA et la Chine [2].

[1] ADEME 2016

[2] France Stratégie

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